Laurent Troude : mort d’un photo-reporter

Barbesse, samedi 19 juillet 2014, la manif en soutien aux palestiniens de Gaza est en train de déraper. Des projectiles fusent de la foule, les CRS répliquent et l’affrontement commence.Plusieurs heures de guérilla urbaine s’en suivent.

Un photographe a pourtant su percer la fumée  des lacrymos.  Il va prendre un cliché qui fera le tour du monde et des réseaux sociaux. Aujourd’hui, personne n’a oublié cette photo improbable.

 

le dandy de Barbesse

 

Une sorte de dandy en costard et col blanc, un carnet de note dans une main et un projectile dans l’autre, qui seul défie la maréchaussée. Une apparition anachronique toute droite sortie des barricades de 1830 ou d’un roman de Victor Hugo.

Les lecteurs de Libé connaissent tous l’auteur de cette photo même s’ils ne connaissent pas forcément son nom. Il s’agit de Laurent Troude, le photographe emblématique du journal qui s’est donné la mort samedi dernier. Ainsi s’est fermé l’un des regards les plus acérés, les plus exigeants mais néanmoins les plus humains qui a pu être porté sur notre société et son actualité ces dernières années.

Son ami des « jours » Sébastien Calvet parle de son travail ainsi :

« Le regard qui échappe, le geste qui échappe, il chope ces interstices-là dans l’actu. C’est très difficile, l’actu, c’est une somme de choses insignifiantes, il faut un fil, qui tient ces choses. »

Quel plus bel hommage pouvait on rendre  à un photo-reporter ?!

Laurent Troude ce n’est évidemment pas que la photo de la manif de Barbesse, c’est d’abord des photos d’actualité exceptionnelles presque au quotidien depuis 30 ans dans les grands titres de la presse française. Un monument du photo-journalisme dans la droite lignée de Depardon.

En guise de clin d’œil de Lombrieur quelques uns de ses clichés parmi ceux que j’ai le plus apprécié

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Najet

Najat en meeting pendant la dernière campagne présidentielle. Un instant de grâce arraché au bruit et à la fureur de la campagne.

 

meeting Fillon

Une militante filloniste. Quelle capacité à tout résumer en un cliché ! L’expression, la posture, la rigidité…tout y est. La droite défraîchie, celle de Thiers, de l’oppression, des privilèges et des injustices. Tout ce que je déteste dans une seule image.

 

Boxe

Laurent Troude aimait aussi photographier le sport. Ici 2 gladiateurs de MMA se font face avant l’affrontement. Comme un air de Spartacus.

 

L’art de photo : « faire face tout en faisant avec ». Et ça Laurent Troude le savait mieux que personne.

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